7ème TRIBUNE DU MESSAGER DE LA PAIX
Par André-Alain Atundu Liongo, Ambassadeur honoraire
Alors que la République Démocratique du Congo affronte une agression militaire directe du Rwanda et que les plaies béantes de l’Est saignent toujours, soulever un débat constitutionnel sur la forme de l’État est non seulement inopportun, mais aussi indécent.
Parler aujourd’hui de Fédéralisme, c’est détourner l’attention des véritables urgences nationales : les massacres, les déplacements massifs, l’occupation de notre territoire. C’est faire injure à nos frères et sœurs du Kivu, victimes d’atrocités et de crimes contre l’humanité.
Le débat sur le Fédéralisme à six provinces est un projet à rejeter. Il ne répond pas aux défis actuels de gouvernance ni aux besoins de développement. Il repose davantage sur des ambitions politiques inavouées que sur une réflexion juridique ou stratégique cohérente.
Historiquement, le Congo a connu plusieurs formes de découpages territoriaux : de deux entités Est/Ouest à six provinces à l’indépendance, puis 11, et aujourd’hui 26. L’évolution a toujours été dictée par la nécessité d’une gouvernance de proximité et d’un meilleur encadrement administratif. Revenir en arrière avec un projet de 6 États fédérés, c’est non seulement rétrograde, mais aussi dangereux, car cela risquerait de réveiller les vieux démons du tribalisme, de la sécession, et de la balkanisation.
En réalité, le défi n’est pas la forme fédérale, mais l’efficacité dans l’application du régionalisme décentralisé actuel. Le programme du développement à partir des 145 territoires montre une orientation claire : rapprocher l’administration du citoyen.
À terme, il serait même logique de faire des 145 territoires autant de provinces, compte tenu de l’étendue du pays, à l’image de la France qui gère 96 départements dans un territoire quatre fois plus petit.
Les véritables enjeux sont ailleurs :
Intelligence territoriale pour mieux gérer nos entités locales,
Intelligence économique pour valoriser nos ressources,
Intelligence stratégique face à l’ingérence de puissances étrangères et à la prédation régionale.
Comparaison n’est pas raison : les États-Unis se sont formés par la volonté d’États souverains de s’unir. En RDC, on veut démembrer une République une et indivisible. Cela n’a rien à voir.
Le projet de Fédéralisme à six États est donc un leurre coûteux, inutile et politiquement risqué. Il ne règle ni les conflits fonciers, ni l’ingérence du Rwanda, ni la gouvernance locale. Il n’est ni une priorité, ni une solution.
Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est préserver l’unité nationale, renforcer la décentralisation, améliorer la gestion des provinces existantes et concentrer nos énergies sur la lutte contre l’occupation et pour le relèvement national.
Le Congo n’a pas besoin d’un débat byzantin sur la Constitution, mais d’un sursaut patriotique collectif.
André-Alain Atundu Liongo est Ambassadeur honoraire de la RDC, et figure politique respectée. Fin stratège et analyste.
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